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Présentation du Synopsis d'un Ouvrage & Table des Matières

Une cause faible et difficile à défendre

De nombreuses villes françaises sont engagées dans des projets de coopération avec des collectivités palestiniennes. En 2022, cela concerne une cinquantaine d’agglomérations, ainsi que des départements et régions. Ces projets prennent la forme de l’aide au développement : le cofinancement pour la construction d’équipements sportifs, de centres de loisirs ou de formation pour les jeunes ; les dons pour le fonctionnement des hôpitaux, dispensaires et centres de santé. Par exemple, la ville de Nanterre a financé l’achat d’une ambulance pour équiper la municipalité de Ayzaria, située en périphérie de Jérusalem, dans le cadre d’un partenariat entre ces deux collectivités visant à renforcer les services publics rendus aux habitants.

Les coopérations ont permis de financer des micro-projets portés le plus souvent par des femmes, tels que la création de coopératives artisanales de fabrication de broderies, de sandales et autres accessoires. Ces projets cherchent à promouvoir le statut des femmes dans la société traditionnelle et accroître leur autonomie. D’autres encore sont davantage centrés sur l’éducation et la jeunesse, afin de développer les échanges culturels et artistiques entre collectivités partenaires. Ainsi, de jeunes stagiaires palestiniens sont venus en France pour se former au sein des collectivités locales. Par exemple, le programme « Jer-Est » a rendu possible l’accueil dans plusieurs villes de la région parisienne de jeunes habitants de Silwan (quartier arabe de Jérusalem-Est) pour suivre une formation aux métiers de l’animation socioculturelle ou aux métiers du numérique (montage de vidéo, les arts multimédias). Ce programme triennal a débuté en 2019 et il a été renouvelé jusqu’en 2025.

On peut se demander pourquoi le soutien aux populations palestiniennes se manifeste dans le cadre de l’aide au développement ou de l’aide médicale d’urgence ? Qui sont les acteurs impliqués dans ces coopérations et quelles sont leurs motivations ? Est-ce qu’il s’agit d’engagements humanitaires en faveur de populations démunies ou victimes de conflits armés ? Ou plutôt d’engagements militants en défense d’une « cause » ? En effet, la cause palestinienne fait l’objet de dévouements de la part d’associations depuis plusieurs décennies, notamment les organisations de défense des droits humains et les ONG d’aide médicale. On peut citer l’Association médicale franco-palestinienne (AMFP) active depuis 1974, l’Association France-Palestine fondée en 1979, la Ligue des droits de l’homme, le MRAP, le CCFD, Amnesty International, ainsi que Médecins sans frontières et Médecins du Monde. Ces associations ont constitué une « Plate-forme des ONG pour la Palestine » en 1993, afin de conduire des programmes d’aide au développement avec le soutien des pouvoirs publics (le ministère des Affaires étrangères et des Coopérations, ainsi que l’Union européenne). Elles sont devenues des partenaires pour les collectivités territoriales impliquées dans les coopérations décentralisées ; celles-ci se sont déployées pour renforcer les institutions palestiniennes mises en place par les accords d’Oslo (1993-1995).

Pour répondre à ces questions, on a privilégié l’enquête de terrain auprès des acteurs investis dans ces coopérations. Cette enquête s’est déroulée sur plusieurs années dans différentes communes de la région parisienne : Pierrefitte-sur-Seine dans le département de Seine-Saint-Denis, Fontenay sous-bois et Choisy-le-Roi dans le Val de Marne. On a observé les projets depuis leur conception jusqu’à la mise en œuvre, le déroulement des politiques de coopération. On a participé aux multiples activités associatives, réalisé des entretiens biographiques dans le cadre de l’enquête. Ces données ethnographiques ont été complétées par le dépouillement d’archives municipales et la consultation d’archives privées. A travers l’observation participante, on a mis en lumière des phénomènes plus généraux pour donner à voir la fabrication des projets de coopération transnationale. Au-delà des institutions officielles (municipalité, conseil général et régional), il s’agit de retrouver les acteurs saisis dans leur environnement quotidien et leur insertion locale, pour observer au plus près la construction ordinaire de ces projets.

L’enquête montre que les engagements sont rendus difficiles en raison de tensions sociales et politiques : les violences intercommunautaires, le regain d’antisémitisme, et la crainte de l’intégrisme religieux. En effet, les coopérations en faveur des populations palestiniennes pourraient alimenter ces tensions, ce qui suscite des suspicions et des inhibitions à agir. Par conséquent, les coopérations sont justifiées par des motifs humanitaires. Ainsi, les élus locaux et les acteurs associatifs valorisent des compétences techniques pour mener à bien les projets d’aide au développement dans les territoires palestiniens. Ils défendent leurs actions en se fondant sur le droit international humanitaire et sur les valeurs pacifistes. On constate ainsi que les enjeux se technicisent, dans le cadre des coopérations décentralisées, et les engagements se professionnalisent au sein des collectivités locales et des ONG. Par exemple, il existe des projets ciblés sur la gestion des déchets, ou sur l’assainissement des réseaux hydrauliques, ou encore sur l’agriculture urbaine.

Afin de mettre en évidence ces évolutions du militantisme, il est nécessaire de faire l’histoire des dévouements en faveur de cette cause humanitaire. En effet, l’essor des coopérations décentralisées se situe dans les années 1990, mais les dévouements militants remontent à une période antérieure. On a reconstitué cette histoire en distinguant des séquences et des conjonctures spécifiques, depuis le début des années 1960 jusqu’à la fin des années 2000. Notre démarche emprunte à la « problématisation » comme mode de lecture de l’histoire, consistant à faire la généalogie d’un problème pour questionner la façon dont il se pose dans le temps présent. Cette socio-histoire met en évidence les transformations dans le répertoire d’actions des groupes mobilisés.

Table des matières

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